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Review – Jean DL – The Room With The Flower Wallpaper – EtherReal

EtherReal – Fabrice Allard – 27/02/2011 – link

Jean D.L. est le projet de l’artiste belge Jean De Lacoste, musicien et vidéaste que l’on découvre ici. Actif depuis 2005 environ, Jean D.L. a notamment collaboré avec Sepia Hours et il apparaissait en mai dernier sur la compilation Free Classical Guitars du label FF HHH, consacrée à des improvisateurs européens de la six cordes.

C’est donc à la guitare que se produit principalement (exclusivement ?) le Belge, avec un mini album croisant douceurs contemplatives et tensions inquiétantes. On passe rapidement d’un style à l’autre, les 8 morceaux sans titres se révélant de courte durée, entre 1 et 3mn, donnant une impression de vignettes sonores, de courtes expérimentations improvisées qui pourraient éventuellement être des bases à un travail futur.
L’ambiance est d’abord sombre, l’album s’ouvrant sur un gros crash métallique et des guitares graves. Celles-ci se font ensuite plus douces, diffuses, voire un peu hésitantes, puis alternent avec des vagues d’une présence plus affirmées, sans que le son ne paraisse vraiment aride.

On ne sait pas dans quelles conditions ce disque a été enregistré, mais on a l’impression qu’il s’agit d’un concert, un set composé d’improvisations, peut-être en raison des flottements ambient qui hantent l’album, à moins que ce ne soit à cause des montées bruitistes de Untitled 04 ou des arrangements bancals qui suivent, lorgnant alors vers la musique contemporaine.
C’est donc une impression de liberté qui domine, comme si ces guitares virevoltaient selon leur bon vouloir, s’étoffant puis disparaissant sans prévenir, bifurquant par des chemins de traverse avant de retrouver une ligne bien définie, donnant même une impression de répétition sur la dernière piste.

Une douceur agréable et une approche finalement assez rare dans le domaine de l’improvisation.

Review – K-branding – Alliance – Indierockmag

Indierockmag – Leoluce – 01/04/2011 – link

Succédant au masque africain de Facial, la forêt sombre d’Alliance cache une musique en perpétuelle évolution : toujours tribale et instinctive, certes mais cette fois-ci K-Branding explore de nouvelles pistes, expérimente de nouvelles ambiances et ajoute une corde supplémentaire à son arc fondamentalement impétueux, celle de la retenue.

En 2009, K-Branding extrait de sa formation chiche constituée simplement d’une guitare mordante, d’une batterie carrée et d’un saxophone furibard un premier long format « officiel » (après une tripotée de CD-R au nombre de copies limité) sobrement intitulé Facial. Un disque dont le masque africain qui orne la pochette me dévisage encore de ses yeux noirs et vides, trônant en bonne place dans la pile d’albums qui ne s’éloignent jamais trop loin de la platine. En 2011, le voici rejoint par la forêt grise, bleue et noire d’Alliance. Et là aussi, il y a fort à parier que ce second opus du trio bruxellois n’aille jamais rejoindre les étagères du haut, celles dont les disques finissent inexorablement par prendre la poussière. D’abord parce qu’Alliance retrouve les fulgurances industrielles et noise de Facial mais aussi parce que le trio y adjoint des accents inédits, bien plus contemplatifs, presque ambient à certains moments, à l’image de la longue introduction inquiète du premier morceau.

Autre changement, la voix qui faisait parfois de timides apparitions de-ci de-là dans le cyclone furieux et majoritairement instrumental de Facial est ici certes mixée en arrière mais bien plus présente. Déclamatoire, criée et pour tout dire séant parfaitement à cette musique azimutée qui aime lorgner du côté du free jazz. Bref, Alliance montre que l’inaugural Facial, loin de n’être qu’un coup d’épée dans l’eau, constituait bien l’acte fondateur d’un groupe dont on aimera désormais suivre les explorations cosmico-industrielles. Et encore, c’est pour faire vite car à mélanger d’une telle manière free jazz et noise rock, dub mortifère et électronique larvée, musique industrielle aux fulgurances punk et no wave aux scories minimalistes, la musique de K-Branding s’avère bien difficile à étiqueter. Une belle personnalité donc. Toujours tribale, toujours viscérale bien sûr, mais cette fois-ci, le cortex aussi s’invite à la fête, non pas qu’il était complètement absent de Facial, loin de là, mais il semble avoir joué des coudes pour revenir à la surface et apparaître sur le photographie finale et le résultat n’en est que plus saisissant.

Le premier morceau d’ Alliance suffit à poser l’ambiance que cache cette sombre forêt rocheuse : au milieu d’un entrelacs déformé, altéré d’effets électroniques, de percussions sourdes et de larsens stridents, un saxophone rêveur déambule sans trop savoir où il va, rebondit d’un côté, puis de l’autre, les clés dans les poches, tranquille, indifférent aux bruits inquiets qui l’entourent puis subitement, tout se met en place et le paysage épars et nuageux du morceau se fait alors complètement industriel : batterie, cuivre et guitare suivent enfin la même direction dans une dynamique conjointe. Aux errances de l’entame se substitue une répétition cinglante, massive et incisive d’où la guitare, un temps, tente de s’échapper. Un morceau Janus aux deux visages, l’un songeur et absorbé, l’autre pragmatique et véloce. Et il en va ainsi du reste du disque, parfois dispersé, parfois regroupé, un temps méditatif, un temps démonstratif, totalement instrumental mais sachant également faire entendre sa voix, un disque qui aime associer dans le même morceau tout et son contraire.

Quoi qu’il en soit, l’aspect monolithique de Facial explose ici en milliers de débris qui, tous, montrent une facette – qu’elle soit déjà connue ou complètement nouvelle – d’une formation mue par la volonté de ne jamais se répéter. Ainsi Empirism montre dans un premier temps des accents cold wave et déclamatoires puis décide de prendre son élan pour finir par rejoindre les limbes industrielles ; rêverie majoritairement électronique, Gefhar est toutefois parcourue de sombres lignes de saxophone et d’une guitare post-punk et répétitive, pas vraiment agressive mais franchement inquiétante de par son côté monomaniaque. Et que dire de l’épisode Astral Feelings, complètement expérimental ? Une électronique crépitante rehaussée de quelques notes de guitare tranchantes, d’une voix atone et de percussions patraques aux chœurs déformés en contrepoint du refrain chanté. Un morceau-Alzheimer et tremblé, singulier. Parcouru de réminiscences du passé et du présent – les ambiances de Throbbing Gristle et d’Einstürzende Neubauten, une guitare qui convoque parfois les ombres de Siouxsie and the Banshees, un saxophone qui rappelle de loin les fulgurances de Mats Gustafsson ou d’un Zu épuré et moins massif – K-Branding continue à n’être finalement que lui-même.

Alliance fait ainsi preuve d’une diversité salutaire qui voit le groupe – la guitare cisaillée de Grégory Duby, la batterie fine de Sébastien Schmit qui fait aussi entendre sa voix au côté de celle de Vincent Stefanutti qui officie également à l’électronique mais dont entend surtout le saxophone acharné – explorer de multiples chemins entre les morceaux et le plus souvent dans les morceaux où les séquences coulent les unes dans les autres, se succédant sans que l’on s’en rende bien compte et on a parfois l’impression de changer de pistes alors qu’il ne s’agit que d’un nouveau mouvement, un autre visage du morceau que l’on est en train d’écouter (à ce titre, les sept minutes saisissantes de Shields qui viennent clore le disque sont très représentatives). Facial était un rouleau compresseur qui ne s’arrêtait jamais et Alliance sait l’être également mais n’hésite pas non plus à ménager des pauses, des passages plus introspectifs au calme apparent car on sent bien que l’eau gronde sous ses plages éthérées, comme le traduit parfaitement cette pochette à la végétation luxuriante mais qui pousse probablement sur un caillou pelé, des arbres aux troncs majoritairement droits mais aussi en biais et puis surtout que gagnent la nuit ou un ciel orageux, précipitant leur cime vers les étoiles. En apparence tranquille mais qui tire quand même vers l’inquiétant.

Une musique désossée, sèche et froide. Triangulaire, le groupe joue serré, près de l’os et montre une belle cohésion exempte de fioritures tout en charriant des arrangements joliment travaillés. L’architecture est paradoxalement finement ciselée et réfléchie alors qu’on a de prime abord l’impression que le trio se disperse et part dans tous les sens à vouloir explorer trop de pistes. C’est que l’improvisation ne peut naître que de l’organisation. Le cortex encore. Avec cet opus, K-Branding ajoute une pièce de taille à son puzzle furieux et l’on sait qu’on les suivra dorénavant les yeux fermés, fût-ce dans une sombre forêt, pour finir par deviner peut-être ce que le dessin final de leur passionnant casse-tête pourrait bien représenter.

Dans sa façon de rebondir en permanence entre fureur et retenue, Alliance est tout simplement et avant tout un disque brillant.

Review – Sudoko – Bru-Tes – Dark Entries

Dark Entries – Didier Becu – 18/01/2011 – Link

Suboko lijkt misschien op één of ander Japanse puzzel maar in muziekland zijn dit eigenlijk drie heren uit Frankrijk die wat noise willen maken. Wanneer u denkt dat Bru-Tes een wat bizarre naam is dan hebt u het ook weer mis want deze cd is eigenlijk een livesessie die is opgenomen in Brussel en Nantes en dit in de periode van Oktober 2009.

Op “Bru-Tes” krijg je 30 minuten muziek die bestaan uit 99 (!) tracks en het leuke is dat je de nummers in willekeurige volgorde kan afspelen. Natuurlijk is dat wel een leuke gimmick, ook al is er waarschijnlijk geen mens die zich daarmee zal bezig houden alhoewel sommige niks anders te doen hebben.

Trouwens wanneer we zoiets vertellen duidt dit ook reeds op het hoog experimenteel karakter van deze release en daarbij zal ik waarschijnlijk niet de enige zijn die dit industrieel werkje zal vergelijken met de begindagen van Einsturzende Neubauten.

Op deze cd hoor je allerlei bizarre geluiden die affiniteiten vertonen met wat je voelt wanneer je het fameuze horrorhuis uit “The Texas Chainsaw Massacre” zou betreden. “Bru-Tres” horen is zoiets als een slachthuis binnengaan waarbij je om elke hoek kijkt of niemand achter je staat.

De metalen geluiden boezemen je angst in terwijl op de achtergrond een monsterachtig geluid je er aan herinnert dat je maar beter op je tellen past. Een ideale soundtrack voor getormenteerde zielen dus.

Interview – Jesus is my son – Shoot me again

Shoot me again – Fred – 10/08/2010 – Link

Petit entretien avec Grégory Duby (K-BRANDING) qui nous parle de lui mais aussi et surtout de JESUS IS MY SON et de son premier album.

Duby, tu te retrouves maintenant tout seul aux commandes de JESUS IS MY SON , comment te sens-tu dans ce projet ?

Vu le coté minimaliste du projet, être seul n’est pas un réel handicap. Ca laisse plus de place à la respiration, plus de liberté sur l’interprétation. Cela a été juste un peu compliqué pour garder la même présence sonore . Il a fallut adapter le son. Après 3 ans d’essais, j’espère y être arrivé.

J’ai vu que tu venais de sortir une disque sous ton nom : GREGORY DUBY . Quelle(s) différence(s) fais-tu avec JESUS IS MY SON où tu es maintenant seul, pour rappel ?

Je me suis longtemps posé la question. Les choses se sont décantées il y a peu. Sous mon propre nom c’est principalement de la musique improvisée ou des compositions spontanées. Pour Jesus is my son , il y a un travail d’écriture en amont. C’est exclusivement des compositions d’ailleurs. Il y a aussi une identité plus marquée dans Jesus is my son , une volonté de cohérence et peut être aussi une approche plus introspective. Jesus is my son est plus personnel peut être.

JESUS IS MY SON , un nouvel album intitulé Je Suis Dieu, une inspiration tirée des compositions pour orgues d’églises, l’utilisation d’iconographie… Quelle est ta relation avec la religion ou les religions ?

Je suis un religieux athée. Ce n’est pas réellement le coté divin qui m’intéresse. C’est plutôt l’Eglise en tant que phénomène à travers les âges. Ce sont aussi les cultes, les rites de tout type qui m’interpellent. On ne peut rester indifférent face à des gens qui se réunissent et communiquent avec un Autre par la prière, la danse, les sacrifices. C’est plus mystique que véritablement religieux.
La religion permet aussi de se placer dans le Monde, de se faire une idée du Monde. Malgré un objectif différent, l’art aussi montre le Monde. Dans Jesus is my son , j’essaye d’approcher l’idée d’immortalité, de rendre un moment éternelle par la lenteur. Grâce à la lenteur, on focalise son esprit sur ce qui se passe entre les évènements, on étire le temps. L’éternité est là, entre les évènements.

On sait que la musique joue un rôle dans la dynamique et la narration d’un film. On n’oublie par contre qu’en matière de religion (orgues d’églises, chants grégoriens, …), de mysticisme (transe chamanique, rythme voodoo…) ou de politique (propagande militaire, …), elle a joué et joue encore un rôle particulier et important. Sans ces « bandes-sons », l’effet d’un discour, d’un dogme serait sans doute moindre. Qu’est-ce qui t’intéressait dans cette musique que tu as choisi de transposer ?

J’aime surtout l’idée d’une musique qui ne s’adresse pas aux hommes mais à l’Homme ou à l’Autre. Une musique pour aider les hommes à s’élever. Une musique en offrande. Je me suis surtout intéressé à la musique d’orgue car elle est à la fois une musique soliste car jouée par une seule personne mais aussi très orchestrale. C’était proche de l’idée que je voulais pour Jesus is my son .
Dans l’album Je suis Dieu, c’est la dévotion, la pénitence, le sacrifice, l’idée d’une éternelle souffrance. C’est aussi la faute originelle. Cette faute qui pèse sous chaque note. La lenteur et la pesanteur pour porter la culpabilité originelle.
On retrouve cette lenteur et cette pesanteur dans le cinquième mouvement Louange à l’Eternité de Jésus du Quatuor pour la fin du Temps de Messiaen. Un mouvement qui a beaucoup influencé l’album. D’ailleurs dans le morceau Louange à mon fils, je reprends les premiers accords du mouvement. C’est discret mais c’est bien là. Le titre est aussi à mettre en lien avec ce mouvement de Messiaen.

Comptes-tu te produire sous le nom de JESUS IS MY SON ?

Après un temps d’hésitation, oui. Maintenant, j’ai vraiment envie de refaire des concerts avec Jesus is my son . Depuis peu, je répète le dimanche matin. Ca m’a permis de travailler la texture du son et de travailler un set. Comme je serai seul sur scène, j’avais vraiment besoin d’être rassuré sur la consistance du projet en live. Et puis, répéter du Jesus is my son le dimanche matin, c’est tout un symbole.

On sait que tu aimes l’expérimentation. As-tu déjà une idée du prochain concept, de la prochaine idée que tu veux exploiter avec JESUS IS MY SON ?

Pour moi, il n’y a pas vraiment d’expérimentation avec ce projet, c’est plus une idée qui est développée. J’aimerai pouvoir ajouter du silence dans Jesus is my son mais j’ai encore peur de ce que j’entendrai dans ces silences. Et comme j’ai dit, dans un futur proche le plus important pour moi est de donner des concerts. Entre temps, il y a mes autres projets pour expérimenter.

Review – K-branding – Live at Nova (Bruxelles – dec 2010)

Next Clues – Totenfest – 18/12/2010 – Link

Auteurs d’un redoutable et excellent Facial, véritable charge noise-indus hypnotique et sans concessions sortie l’an dernier sur le label bruxellois Humpty Dumpty Records, K-Branding revient enfin au Nova avec un double set comprenant un ciné-concert puis un live classique.

Invités par le Cinéma Nova à travailler sur des films courts et expérimentaux, le groupe en aura finalement choisi trois, d’époque et de notoriété diverses.
Outer Space de Peter Tscherkassky, visible ici en piètre qualité, d’ores et déjà un classique du film expérimental, primé à juste titre un peu partout, propose la relecture radicale d’une scène tirée de Entity de Sydney J. Furie. Montage hallucinant et travail au stylo lumineux permettent à Tscherkassky de recréer une nouvelle pellicule où le film devient finalement l’unique menace réelle, l’agresseur invisible prêt à s’immoler pour tuer. Film sur la peur, sur la schizophrénie, mais aussi réflexion sur l’art du montage et les possibilités du cinéma, Outer Space met d’entrée de jeu la barre très haut, d’autant plus que le son originel de l’œuvre, simple bruit de la pellicule en souffrance, est proche de la perfection.
Les K-Branding vont opter pour l’option la plus évidente : créer une musique angoissante et horrifique pour accompagner ce crescendo dans le chaos et l’oppression.
Pour aider les malheureux ignorants à se faire une idée, on peut dire que la musique du groupe bruxellois oscille entre différents pôles d’attraction, de Naked City à Sightings avec une bonne louche de Throbbing Gristle, le tout tendant vers la transe et l’hypnose.
Leur bande-son du film Outer Space va donc développer un univers sordide à base de sifflements et de grésillements qui vont aller dégénérant vers une transe bancale et malsaine.
Oui, ça fait beaucoup d’adjectifs évoquant la même chose : le Mal, Satan, la psychose, la boue, en tout cas pas la mélodie du bonheur. À ma décharge, force est de reconnaitre que la musique composée pour l’occasion manquait peut-être légèrement de subtilité et de contrastes, et qu’elle peinait quelque peu à rendre grâce à la complexité et à l’envoutement provoqués par le film.
Comme souvent, le concept prometteur du ciné-concert se heurte à la masse de travail nécessaire pour créer une bande-son réellement adaptée au film, et laisse au spectateur un goût d’inachèvement un peu désagréable.

Heureusement, le film suivant, Living, de Frans Zwartjes, va être l’occasion pour le groupe d’offrir un grand moment de transe industrielle.
Moins impressionnant dans sa forme que le très abouti Outer Space, Living montre les déambulations dans une maison presque vide de Frans Zwartjes et de sa femme. Les mouvements improbables de caméra ne soulignent que leur quasi-immobilité, Frans suçote compulsivement son mouchoir et Trix finit par montrer ses seins. Résumé comme ça, ça semble ridicule, et sans doute c’en est vraiment pas loin, mais une étrangeté finit par opérer sur le long terme et au final, c’est assez troublant.
Sur ce canevas très vide, les K-Branding vont construire patiemment une cavalcade indus aux relents krautrock rythmée par les sons électroniques bien froids tirés des pads de la batterie. Faisant monter lentement la tension, le groupe va atteindre un rythme de croisière redoutable et créer un terrible moment d’hypnose et d’absence.
Gros plaisir général et réchauffement direct de la température dans la salle du Nova.

Le dernier film choisi par les musiciens date de 1925, il s’agit de Jeux Des Reflets Et De La Vitesse par Henry Chomette…
Une version infâme est disponible ici.
Un film simple mais nerveux (voire qui tend vers l’hystérie), sur lequel les K-Branding vont tout simplement asséner un gros free-noise bien agressif.
Pas l’option la plus originale encore une fois, mais qui a le mérite d’être efficace.

Pause de vingt minutes et dégustation de bières au bar pendant que le groupe se reconfigure pour un set live classique attendu avec une certaine impatience et curiosité par votre serviteur.
Car K-Branding, qui avait disparu des radars pendant quelques mois, revient enfin en 2011 avec de nouveaux morceaux et un nouvel album, qui serait d’ailleurs déjà enregistré et en cours de mixage.
Donc la question est : que cela va-t-il donner ?

Et pour y répondre, on remonte rapidement vers la salle du Nova (car à l’inverse de la plupart des lieux, le bar est ici dans la cave tandis que la salle est au rez-de-chaussée).
Le point un peu contrariant de faire un concert dans une salle de cinéma, c’est qu’on ne peut pas enlever les sièges. Il va donc falloir s’asseoir et contempler le groupe de loin, sans pouvoir suer un peu des oreilles à proximité des amplis.
C’est assez frustrant et rend l’ambiance générale un peu molle, mais passons.

Quels changements notables peut-on noter dans l’équipement du groupe qui puisse laisser présager de changements musicaux marquants?
Les pads électroniques de la batterie de Sébastien Schmit (amateurs d’ambiances maussades, voir aussi son projet Service Special) reliés à un contrôleur midi ont déjà prouvé leur efficacité durant le ciné-concert ; le guitariste Grégory Duby (dont vous pouvez aussi au passage consulter les projets Jesus is my Son et, euh, Grégory Duby, c’est très bon) joue sur un Twin Reverb à présent ; il y a peut-être plus de machines et de bazar analogique autour du saxophoniste Vincent Stefanutti qu’avant, mais à part ça, la configuration reste la même : un trio guitare-batterie + machines-saxo + machines-voix…
Et en effet, la musique du groupe n’a pas fondamentalement changé, on reste dans les mêmes atmosphères extrémistes et saturées, dans les rythmiques à la fois complexes et irrésistibles qui tendent toutes vers la folie.
Peut-être peut-on noter un desséchement des ambiances, avec une part plus grande laissée à la répétition, aux climats délétères, et moins de furie noise qu’avant (plus de Throbbing Gristle et moins de Sightings, pour situer) ?
Certaines structures de morceaux m’ont aussi paru plus simples qu’auparavant, voire laissées à l’abandon, en état larvaire. Dur de dire si c’est le signe d’un laisser-aller ou s’il s’agit d’un choix délibéré, car ce refus presque autiste de la structure sur un ou deux morceaux ne laisse pas non plus indifférent mais rend cette musique encore plus malade et nihiliste.
D’autres morceaux sont parfaitement hypnotiques et pourraient – plutôt devraient, d’ailleurs – vraiment durer bien plus longtemps, et ceci sans aucun changement (oui, j’aime les musiques répétitives).
Le rappel bat le retour des rythmiques guerrières de la jungle cold-wave héritées de Facial, et tout le monde est conquis.

Au final, dur de juger les nouveaux morceaux de K-Branding à l’aune d’un seul concert dans une salle de cinéma, mais tout cela m’a eu l’air tout à fait redoutable, parfaitement malade et toujours en quête de transe.

Verdict : vivement le disque.

Review – Jesus is my son – Je suis Dieu – Foxy Digitalis

Foxy Digitalis – Jordan Anderson – 28/07/2010 – Link

This is an excellent series of devotional pieces by Jesus is my son, evidently influenced by “Olivier Messiaen’s Christian music,” and attempting to make “a Church organ album with a single guitar without any artifact,” according to notes for the album. It is a highly interesting concept, and the recordings presented here are as interesting as the idea behind them: not only do some of the best aspects of the recordings come from a real heaviness of the distorted, fingerpicked guitar, on pieces such as “L’Ascension du Seigneur” and “Le Chemin de Croix – station 4,” but on the arpeggiated “Hymne a la Vierge Marie,” a genuine highlight of the record, played in what sounds like the style of a Baroque composition, a real sense that the artist has accomplished what they have set out to do is expressed. 9/10 — Jordan Anderson (28 July, 2010)

Review – Jesus is my son – Je suis Dieu – Shoot me again

Shoot me again – Fred – 06/07/2010 – Link

Je Suis Dieu… rien que ça ! Quand on appelle son projet JESUS IS MY SON , il n’y a rien d’étonnant de se prendre pour Dieu après. Et quand on veut faire de la musique christique comme Olivier Messiaen, il ne faut pas se surprendre à s’interroger si l’auteur ne nous fait pas une crise mystique.

En solitaire maintenant, Duby reprend les commandes 4 ans après le EP Sacrifices Odieux. Toujours mu par ses expérimentations sonores, JESUS IS MY SON a pour ambition de recréer une musique similaire à celle des orgues d’églises avec sa seule guitare. Sans d’autres artifices que la distorsion, Je Suis Dieu développe une musique lente et atmosphérique. Aux ambiances étranges et stridentes, elle résonne de ses mystères.

Si le son de guitare ne trompe pas, il est vrai que le style est organesque, engendrant un climat malsain fait d’introspection, de mysticisme et d’angoisse. Avec cette retranscription occulte de cette crainte du jugement du Tout Puissant, ma demeure prend sous ce déluge de sons des allures de lieux de culte et de recueillement. Mes vitres se changent en vitraux sombres, rouges et bleus qui tamisent la lumière.

L’esprit se serre et les torpeurs refont surface. Subjugué par cet univers, le temps s’est arrêté et l’expérience se vit dans la douleur et la culpabilité. Tout comme la musique du film de Stanley Kubrick, Shining, contribue à plonger le spectateur dans cet univers de folie et de possession, JESUS IS MY SON retranscrit la culpabilité inculquée, bien malgré nous, par deux millénaires de christianisme qui rode dans ces monuments abyssaux que sont les églises.

La tentative était audacieuse. En créant un son massif, chargé d’écho et de résonance, JESUS IS MY SON parvient incontestablement à relever le défi qu’il s’est lancé. On ne sort pas indemne de cette expérience qui rappelle finalement à quel point un monde uniquement fait d’images ou de discours serait bien moins efficace et qui soulève la question du rôle de la musique dans l’endoctrinement religieux.